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 Haiti-Refondation.org

LES RICHESSES D’HAÏTI SECRÈTEMENT LIQUIDÉES ?

30 Juillet 2012, 11:12am

Publié par haiti-refondation-org

Pendant que l’attention des haïtiens était toute tournée vers l’organisation du « carnaval des fleurs », la compagnie minière Eurasian Minerals, le vendredi 27 juillet 2012, dans un bref rapport (quick report) destiné à ses investisseurs, annonce que « le partenariat Eurasian-Newmont  a obtenu la permission de forer pour certains projets, grâce au protocole d’entente ; et le forage se poursuit présentement ». À Grand Bois « Three drill holes (GBDH-17, -21, and -26) were drilled outside of the historic resource area, and between them returned grades and thicknesses averaging 1.05 g/t gold and 32.3 meters, respectively. »…

En ce qui nous concerne, votre or nous intéresse. Haïtiens continuez à danser  le Carnaval.

http://www.eurasianminerals.com/s/Haiti-GrandBois.asp

Les richesses d’Haïti secrètement liquidées ?

« Nous sommes prêts à forer », déclarait Daven Mashburn de Newmont Mining, vers la fin de 2011, en parlant de Lamielle.
« Puisque le gouvernement d’Haïti s’en fout […], il nous est impossible de mettre en œuvre nos concessions. Cela signifie que les gens ne peuvent trouver d’emplois ».
Pourtant, le gouvernement est loin de s’en foutre.
Peu après cette entrevue, les concessions ont été consenties, quoique d’une manière pas tout à fait légale.

GOLD D18 drillers Depp

« Le gouvernement leur a accordé une sorte de dérogation », expliquait Ronald Baudin (ex-ministre des finances d’Haïti de 2009 à 2011 et ancien directeur général du ministère), qui a supervisé les négociations avec Eurasian alors qu’il occupait cette puissante position.
« Ils sont conscients du tort qu’ils font à la compagnie… Celle-ci a plusieurs bases, plusieurs camps partout dans le pays, avec une très importante logistique. Elle dépense beaucoup d’argent. Et voilà qu’elle arrive à une étape et reste bloquée, du seul fait que la convention n’a pas encore été signée ».
Baudin, qui a quitté ses fonctions lorsque le nouveau gouvernement de Joseph Michel Martelly a été mis en place en 2011, est aujourd’hui un conseiller rétribué du partenariat Eurasian-Newmont, qui porte le nom de « Newmont Ventures ».
Toutefois, un protocole d’entente ne saurait l’emporter sur une loi. Aucune dérogation n’est possible en matière de législation.
« Il y a ce qu’on appelle la hiérarchie des lois. D’après cette hiérarchie, un protocole est plus faible qu’une loi. Un protocole ne peut pas annuler une loi. Il ne peut pas autoriser à faire quelque chose que la loi n’autorise pas », relève l’avocat des droits humains, Patrice Florvilus.
Le directeur de l’agence responsable des mines – le BME – n’a pas signé le protocole d’entente.
« Je n’étais pas d’accord, pour la simple et bonne raison que si la loi n’autorise pas quelque chose, … vous n’avez pas le droit de le faire ! », souligne Anglade au cours d’une entrevue le 24 mai 2012.
Son bureau n’en a même pas reçu un exemplaire.
Ce refus a été, peut-être, l’une des raisons pour que l’un des premiers actes officiels, du nouveau gouvernement Lamothe, ait été de destituer Anglade.
Anglade, âgé de 62 ans, compte près de 30 années de service au BME, qu’il a dirigé de près au cours des 20 dernières années. Il a une réputation d’honnêteté.
La loi mise sous la torture
Malgré le refus d’Anglade, le protocole d’entente a été signé par le précédent ministre des finances et celui des travaux publics vers la fin du mois de mars 2012. Ainsi, le 23 avril, Eurasian a-t-elle pu joyeusement rapporter à ses actionnaires que « le partenariat a obtenu la permission de forer pour certains projets, grâce au protocole d’entente ; et le forage se poursuit présentement ».
Eurasian et Newmont, qui n’ignorent point la législation, semblent croire qu’Anglade a signé le document. selon une correspondance avec Akj en date du 25 mai 2012.
Mais tel n’a pas été le cas.
Anglade est également en désaccord avec une convention d’exploitation minière, qui risque d’être signée sous peu, vu qu’après trois mois d’attente, Haïti a enfin un Premier ministre, Laurent Lamothe, qui s’est engagé à rendre la législation du pays plus favorable aux affaires.
Selon Anglade, la version finale – qu’il a rejetée par l’entremise d’une lettre officielle au président de l’époque, René Garcia Préval, et au ministre des finances à ce moment-là, Ronald Baudin – est beaucoup plus faible que les deux plus petites conventions minières existantes d’Haïti (pour 50 kilomètres carrés chacune), parce que les principales clauses de sauvegarde ont été supprimées.
L’article 26.5 – des conventions antérieures – plafonnait les dépenses qu’une entreprise pouvait déclarer à 60 pour cent des revenus. Il est à présent caduc, selon le directeur du Bme.
« Ce qui veut dire que la compagnie peut venir dire qu’elle a dépensé 90 dollars, qu’il ne reste plus que 10 dollars », dit Anglade.
Une deuxième clause a également été supprimée, dit-il : l’Article 26.4, qui garantissait un partage, à parts égales, des profits entre les entreprises minières et le gouvernement.
« Durant les 2 années, passées à négocier ; ma position était claire [...] », dit cet homme de 62 ans, qui, ayant passé toute sa vie dans la fonction publique, enseigne aussi les mathématiques à l’université d’État d’Haïti (Ueh).
« Ces 2 articles, le bureau des mines n’a jamais voulu les enlever [...] C’est lorsque le dossier a quitté le bureau des mines, qu’ils ont négocié et enlevé ces articles. Ce n’est point moi qui les ai enlevés. Après le bureau des mines [...], ils ont fait une réunion au ministère des finances [...] C’est le ministre lui-même qui les a ôtés, le ministre Baudin ».
Interrogé à propos de la convention, Baudin déclare qu’il ne pouvait pas entrer dans les détails.
« Ce que, moi personnellement, je puis vous dire, à présent, nous avons un texte qui a obtenu le consensus de la compagnie, du ministère des travaux publics, du bureau des mines, du ministère des Finances », reconnaît-il néanmoins.
Pas, d’après Anglade.
« Pour rien au monde, je n’enlèverais ces articles », précise-t-il.
Le ministre des travaux publics, Jacques Rousseau, est le supérieur d’Anglade. Son ministère, qui supervise le Bme, est en possession de la convention pendante.
Rousseau a refusé cinq (5) demandes d’entrevue. C’est pourquoi, l’absence des clauses de sauvegarde dans le document ne peut pas être confirmée.
Cela dit, Anglade jure que les mesures sont absentes.
Entre-temps, le protocole d’entente, illégal, a été rendu public. Et Baudin est ostensiblement à la solde de Newmont.
« Je veux que ce soit clair pour la nation : le Bme n’est pas responsable de ce qui a été fait au profit de l’entreprise jusqu’à maintenant », affirme Anglade.
Lorsque Baudin a été interrogé à propos du conflit d’intérêts potentiel, découlant du fait qu’il a occupé les fonctions de ministre des finances avant de se recycler immédiatement en consultant à la solde de Newmont, il est resté de marbre.
« Il existe d’autres pays où, lorsque quelqu’un a fini d’exercer de telles responsabilités, il y a une période de temps, au cours de laquelle il n’a pas le droit de travailler pour le privé. Mais, en la circonstance, il a une compensation. Nous autres, nous n’avons pas cela dans notre législation », accouche Baudin.
« Et aujourd’hui, au moment où je vous parle, depuis mon départ du ministère des finances, je ne reçois pas une gourde de l’État. Ensuite, je dois manger, n’est-ce pas ? Je dois m’habiller [...] » [akj apr 05/06/2012 12:00]

* « Ayiti Kale Je » (http://www.ayitikaleje.org/) est une initiative de partenariat médiatique en vue d’assurer des investigations journalistiques sur la reconstruction d’Haïti suite au séisme dévastateur qui a frappé le pays et fait 300.000 morts et autant de blessés.

Le Groupe Médialternatif est un des partenaires de cette initiative, à travers son agence multimédia AlterPresse (http://www.alterpresse.org/), avec la société pour l’animation de la communication sociale (Saks - http://www.saks-haiti.org/). Deux réseaux participent également : le réseau des femmes animatrices des radios communautaires haïtiennes (Refraka) et l’association des médias communautaires haïtiens (Ameka), qui est composée de stations de radios communautaires à travers le pays.

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